Par Dmitry Kalinichenko – Le 26 décembre 2014
Très peu de gens comprennent ce que fait Vladimir Poutine actuellement. Et presque personne ne comprend ce qu’il va faire dans les temps à venir. Tout aussi étrange que cela puisse paraître, mais, d’ores et déjà, Poutine ne vend du pétrole et du gaz naturel de la Russie qu’en échange d’or physique.
Poutine ne le crie pas sur les toits. Et, bien sûr, il accepte toujours les dollars US comme moyen intermédiaire de paiement. Mais, il échange illico tous ces dollars obtenus de la vente de pétrole et de gaz naturel pour de l’or physique !
Afin de le comprendre, il suffit de regarder la dynamique de croissance des réserves en or de la Russie et de comparer ces données aux revenus d’échanges monétaires de la Fédération de Russie provenant de la vente de pétrole et de gaz naturel sur la même période.
En outre, au troisième trimestre, les achats par la Russie d’or physique sont au plus haut niveau jamais atteint. Au troisième trimestre de cette année, la Russie avait acheté une quantité phénoménale d’or, à la hauteur de 55 tonnes. C’est plus que toutes les banques centrales de tous les pays du monde au même moment (selon les données officielles) !
Au total, les banques centrales de tous les pays du monde ont acheté 93 tonnes du métal précieux au troisième trimestre de 2014. C’était le quinzième trimestre consécutif d’achats nets d’or par des banques centrales. Des 93 tonnes d’achats d’or par des banques centrales autour du monde durant cette période, le montant le plus conséquent d’achats, 55 tonnes, appartient à la Russie.
Il n’y a pas si longtemps, des scientifiques britanniques sont parvenus avec succès à la même conclusion que celle qui fut publiée il y a quelques années dans la Conclusion de l’US Geological Survey. C’est-à-dire : L’Europe ne parviendra pas à survivre sans approvisionnement énergétique provenant de la Russie. Traduit de l’anglais dans n’importe quelle langue, cela signifie : « Le monde ne parviendra pas à survivre si le pétrole et le gaz naturel de la Russie sont soustraits à la balance globale d’approvisionnements en énergie ».
Ainsi, le monde occidental construit sur l’hégémonie du pétrodollar est dans une situation catastrophique, dans laquelle il ne peut survivre sans approvisionnements énergétiques en provenance de la Russie. Et, la Russie n’est maintenant prête à vendre son pétrole et son gaz naturel à l’Occident qu’en échange d’or physique ! Le piège dans le jeu de Poutine, c’est que le mécanisme de vente d’énergies russes à l’Occident uniquement en échange d’or fonctionne déjà, que l’Occident veuille ou non payer pour le pétrole et le gaz naturel de la Russie avec son or artificiellement peu cher.
Puisque la Russie dispose d’un flux constant de dollars de la vente de pétrole et de gaz naturel, elle parviendra à convertir ces dollars pour acheter de l’or au prix actuel, tiré vers le bas de toutes les façons par l’Occident. Ceci équilibre le prix de l’or, qui avait été artificiellement et méticuleusement abaissé par la Fed et l’ESF (Fonds de Stabilisation des Échanges) à plusieurs reprises… par le pouvoir d’achat artificiellement gonflé du dollar à travers la manipulation des marchés.
Fait intéressant : La manipulation à la baisse des cours de l’or par cette administration spéciale du gouvernement US, l’ESF, en vue de stabiliser la valeur du dollar est devenue une loi aux États-Unis.
Dans le monde financier, il est généralement considéré que l’or est anti-dollar… c’est-à-dire que le prix de l’or est inversement proportionnel à la valeur du dollar.
En 1971, le Président des États-Unis, Richard Nixon, avait fermé la « fenêtre de l’or », mettant ainsi fin au libre échange de dollars pour de l’or, garanti par les États-Unis en 1944 aux accords de Bretton Woods.
En 2014, le Président de la Russie, Vladimir Poutine, a ré-ouvert la « fenêtre de l’or », sans en demander la permission à Washington.
En ce moment, l’Occident dépense une bonne partie de ses forces et de ses ressources pour tirer vers le bas les prix de l’or et du pétrole. Ainsi donc, d’une part pour distordre la réalité économique existante en faveur du dollar US… et d’autre part, pour détruire l’économie russe, qui refuse de jouer le rôle de vassal obéissant de l’Occident.
Aujourd’hui, des biens tels que l’or et le pétrole semblent proportionnellement affaiblis et excessivement sous-évalués face au dollar US. C’est la conséquence d’un énorme effort économique de la part de l’Occident.
Et, désormais, Vladimir Poutine vend les ressources énergétiques russes en échange de ces dollars US, artificiellement soutenus par les efforts de l’Occident. Avec ces dollars produits par les ventes, Vladimir Poutine achète immédiatement de l’or, artificiellement dévalué contre le dollar US par les efforts de l’Occident lui-même !
Il y a un autre élément intéressant dans le jeu de Vladimir Poutine. C’est l’uranium russe. Une ampoule sur six aux États-Unis dépend de cet approvisionnement, que la Russie vend également aux États-Unis … pour des dollars.
Donc, en échange du pétrole, du gaz naturel et de l’uranium en provenance de la Russie, l’Occident paye la Russie avec des dollars US, dont le pouvoir d’achat est artificiellement gonflé vis-à-vis de l’or et du pétrole par les manipulations de l’Occident. Cependant, Vladimir Poutine ne se sert de ces dollars que pour soustraire de l’or physique à l’Occident en échange d’un prix défini en dollars US, artificiellement abaissé par le même Occident.
Cette combinaison économique véritablement brillante de la part de Vladimir Poutine met l’Occident, dirigé par les États-Unis, dans la position d’un serpent dévorant agressivement et diligemment sa propre queue.
L’idée de ce piège économique en or pour l’Occident n’a probablement pas son origine chez Vladimir Poutine lui-même. C’est plus sûrement l’idée du conseiller en affaires économiques de Poutine, le Dr Sergey Glazyev. Sinon, pourquoi le bureaucrate Sergey Glazyev, sensiblement sans implication dans le monde des affaires, a-t-il été, avec beaucoup d’hommes d’affaires russes, personnellement inclus dans la liste des personnes sanctionnées par Washington ? L’idée d’un économiste, le Dr Sergey Glazyev, a été brillamment exécutée par Vladimir Poutine… mais, avec tout l’aval de son collègue chinois, Xi Jinping.
Dans ce contexte, la déclaration de novembre du premier Président Adjoint de la Banque Centrale de Russie, Ksenia Yudaeva, semble particulièrement intéressante. Elle a souligné que le cas échéant, la Banque Centrale de la Russie pouvait se servir de l’or dans ses réserves pour payer ses importations. Il est évident qu’au regard des sanctions du monde occidental, cette déclaration est adressée aux pays des BRICS, dont le premier est la Chine. Pour la Chine, la disposition de la Russie de payer des biens avec de l’or occidental est très commode. Et voici pourquoi :
La Chine a récemment annoncé qu’elle allait cesser d’augmenter ses réserves d’or et de monnaie sous dénomination des dollars US. Prenant en considération le déficit commercial croissant entre les États-Unis et la Chine (la différence actuelle est d’un facteur de cinq fois en faveur de la Chine), alors cette déclaration traduite dans le jargon financier signifie : « La Chine arrête de vendre ses marchandises pour des dollars ». Les médias mondiaux ont choisi de ne pas prêter attention à cet événement monétaire qui a marqué l’histoire récente. Le sujet n’est pas que la Chine refuse littéralement de vendre ses marchandises pour des dollars US. La Chine, bien entendu, continuera à accepter des dollars US comme moyen intermédiaire de paiement pour ses marchandises. Mais, ayant pris les dollars, la Chine s’en débarrassera immédiatement et les remplacera par autre chose, dans la structure de ses réserves en or et en monnaie. Sinon, la déclaration faite par les autorités monétaires chinoises perd son sens : « Nous arrêtons l’augmentation de nos réserves d’or et de monnaie, sous dénomination des dollars ». Cela veut dire que la Chine n’achètera plus de Bons du Trésor des États-Unis avec des dollars acquis par le commerce avec n’importe quel pays, comme elle le faisait auparavant.
Ainsi, la Chine remplacera tous les dollars qu’elle recevra dorénavant pour ses marchandises, non seulement des États-Unis mais du monde entier, par quelque chose d’autre, pour ne pas augmenter ses réserves d’or et de monnaies définies en dollars. Et, voici une question intéressante : Par quoi la Chine va-t-elle remplacer tous les dollars issus de son commerce ? Par quelle monnaie ou quel bien ? L’analyse de l’actuelle politique monétaire chinoise démontre certainement que les dollars provenant du commerce, ou une portion substantielle d’entre eux, la Chine va les remplacer discrètement, et elle le fait déjà de facto, par de l’or.
De ce point de vue, la partie de solitaire des relations russo-chinoises est extrêmement profitable à la fois pour Moscou et pour Beijing. La Russie achète des marchandises à la Chine directement pour de l’or à son prix actuel. Tandis que la Chine achète des ressources énergétiques russes pour de l’or à son prix actuel. Dans ce festival de la vie russo-chinoise, il y a de la place pour tout : Des marchandises chinoises, des ressources énergétiques russes, de l’or, comme moyen de paiement mutuel. Seul le dollar US n’a aucune place dans ce festival de la vie. Et, ce n’est pas surprenant. Parce que le dollar US n’est pas un produit chinois où une ressource énergétique russe. Ce n’est qu’un moyen intermédiaire de règlement et un intermédiaire superflu. Et, il est de coutume d’exclure les intermédiaires superflus des interactions entre deux partenaires commerciaux indépendants.
Par ailleurs, il est important de noter que le marché global pour l’or physique est extrêmement petit en comparaison au marché mondial des ressources pétrolières physiques. Et surtout, le marché global pour l’or physique est microscopique en comparaison à la totalité des marchés mondiaux de livraisons de pétrole, de gaz naturel, d’uranium et de marchandises.
L’accent est mis sur les mots « or physique » pas « sur le papier », parce qu’en échange de ses ressources énergétiques physiques la Russie soustrait aujourd’hui de l’or à l’Occident, mais seulement sous son aspect physique, pas « sur le papier ». La Chine accomplit la même chose en recevant de l’Occident de l’or physique artificiellement dévalué comme paiement pour la livraison de marchandises réelles à l’Occident.
Les espérances entretenues par l’Occident que la Russie et la Chine veuillent bien accepter comme paiement pour leurs ressources énergétiques et leurs marchandises de la … « monnaie de singe » ou « or sur le papier » sous quelque forme que ce soit, n’ont pas prospéré. La Russie et la Chine ne sont intéressées que par de l’or tangible, et seulement le métal physique, comme moyen final de paiement.
Comme référence: Le roulement du marché de l’or sur le papier, ou uniquement d’options sur l’or, est estimé à $360 milliards par mois. Mais les livraisons physiques d’or ne représentent que $280 millions par mois. Ceci donne un ratio d’échange d’or sur papier face à l’or physique de 1000 pour 1.
En utilisant le mécanisme de retrait actif du marché d’un bien financier (l’or) artificiellement dévalué par l’Occident en échange d’un autre bien financier (USD) artificiellement surévalué par l’Occident, Vladimir Poutine a ainsi démarré le compte à rebours qui mènera à la fin de l’hégémonie planétaire du pétrodollar. De cette manière, Vladimir Poutine a placé l’Occident dans un étau, en l’absence de perspectives économiques saines.
L’Occident ne peut dépenser tant d’efforts et de ressources pour augmenter artificiellement le pouvoir d’achat du dollar, abaisser les prix du pétrole et artificiellement dévaluer le pouvoir d’achat de l’or. Le problème de l’Occident est que ses stocks d’or physique en sa possession ne sont pas inépuisables. Par conséquent, plus l’Occident dévalue le pétrole et l’or contre le dollar US, plus rapidement il perdra l’or dévalué de ses réserves qui ne sont pas infinies.
Dans cette combinaison économique brillamment jouée par Vladimir Poutine, l’or physique des réserves de l’Occident afflue rapidement vers la Russie, la Chine, le Brésil, le Kazakhstan et l’Inde (c’est-à-dire les pays des BRICS). Au rythme actuel de réduction des réserves d’or physique, l’Occident n’a tout simplement pas le temps de faire quoi que ce soit contre la Russie de Poutine jusqu’à l’effondrement de tout le monde occidental du pétrodollar. Avec ces échecs, la situation dans laquelle Vladimir Poutine a placé l’Occident, dirigé par les États-Unis, est celle du « problème de temps ».
Le monde occidental n’a jamais affronté des événements et des phénomènes économiques comme ceux qui se produisent en ce moment. L’ancienne URSS a rapidement vendu son or pendant la chute des prix de l’or. Aujourd’hui, la Russie achète rapidement l’or pendant la chute des prix du pétrole. Ainsi, la Russie pose une réelle menace au modèle des États-Unis de la domination du monde par le pétrodollar.
Le principe essentiel du modèle du monde, selon le pétrodollar, est de permettre aux pays occidentaux, dirigés par les États-Unis, de vivre aux dépens du labeur et des ressources d’autres pays … sur la base du rôle dominant de la monnaie US dans le Système Monétaire International (SMI). Le rôle du dollar US dans le Système Monétaire International est qu’il est le mode ultime de paiement. Ceci signifie que la monnaie nationale des États-Unis, dans la structure du Système Monétaire International, est l’ultime accumulateur de biens, en face duquel l’échange de n’importe quel autre bien n’a pas de sens.
Emmenés par la Russie et la Chine, ce que font actuellement les BRICS est en réalité de changer le rôle du dollar US dans le SMI. De l’ultime mode de paiement et d’accumulations de biens, la monnaie nationale des États-Unis, par le biais des actions conjointes de Moscou et de Beijing, ne devient rien de plus qu’un moyen intermédiaire de paiement, dont l’usage n’est entendu que pour l’échange de ce moyen de paiement intermédiaire pour un autre et le bien financier ultime, l’or. Ainsi, le dollar US perd en réalité son rôle comme mode ultime de paiement et d’accumulations de biens, cédant ces deux rôles à un autre bien monétaire reconnu, dénationalisé et dépolitisé, l’OR !
Traditionnellement, l’Occident a utilisé deux méthodes pour éliminer les menaces à l’hégémonie du modèle du pétrodollar dans le monde, et aux privilèges excessifs pour l’Occident qui en ont découlé :
Une de ces méthodes était celle des révolutions colorées. La seconde méthode, qui était habituellement employée par l’Occident si la première échouait, c’était l’agression militaire et les bombardements.
Mais, dans le cas de la Russie, ces deux méthodes sont soit impossibles soit inacceptables pour l’Occident.
Tout d’abord, parce que la population russe, contrairement aux populations de beaucoup d’autres pays, ne désire pas échanger sa liberté et l’avenir de ses enfants pour de la kielbasa occidentale (saucisse à la viande). Ceci est évident avec les taux d’approbation records pour Vladimir Poutine, régulièrement publiés par les plus grandes agences de sondages occidentales. L’amitié personnelle du protégé de Washington, Navalny (opposant politique de Vladimir Poutine), avec le Sénateur John McCain a joué pour lui un rôle particulièrement néfaste. Ayant appris ce fait par les médias, 98% de la population russe ne perçoit désormais Navalny que comme un vassal de Washington et un traître pour les intérêts nationaux russes. Donc les professionnels occidentaux, qui n’ont pas encore perdu l’esprit, ne peuvent rêver d’une quelconque révolution colorée en Russie.
Pour ce qui est de la seconde méthode traditionnelle, l’agression militaire directe, la Russie n’est sûrement pas la Yougoslavie, l’Irak ou la Libye. Dans toute opération militaire non-nucléaire contre la Russie, sur le territoire de la Russie, l’Occident, dirigé par les États-Unis, est condamné à la défaite. Et, les généraux du Pentagone, qui exercent le vrai commandement des forces de l’OTAN, en sont conscients. Une guerre nucléaire contre la Russie serait tout aussi désespérée, y compris le concept d’une prétendue « frappe nucléaire préventive ». L’OTAN ne serait tout simplement pas techniquement capable de frapper un grand coup pour désarmer le potentiel nucléaire de la Russie dans toutes ses manifestations. Une frappe nucléaire massive en représailles contre l’ennemi ou un éventail d’ennemis serait inévitable. Et, sa puissance totale suffirait pour que les survivants envient les morts. Alors, un échange nucléaire avec un pays comme la Russie n’est pas une solution au problème imminent de l’effondrement du monde du pétrodollar. C’est, dans le meilleur des cas, un dernier recours et le dernier point de l’histoire de son existence. Dans le pire des cas, un hiver nucléaire et la ruine de toute vie sur la planète, à l’exception des bactéries qui auront muté à cause des radiations.
L’establishment économique occidental peut voir et comprendre l’essence de la situation. Des économistes occidentaux éminents sont certainement conscients de la gravité du problème et du désespoir de l’impasse dans laquelle se trouve le monde occidental, dans le piège doré de Vladimir Poutine. Après tout, depuis les accords de Bretton Woods, nous connaissons tous la règle d’or en vigueur : « Celui qui possède plus d’or impose les règles ». Mais, tout le monde en Occident reste silencieux là-dessus. Silencieux parce qu’aucun ne sait comment sortir de cette situation.
Si vous expliquez au public occidental tous les détails du désastre économique à venir, le public posera aux promoteurs du monde du pétrodollar les plus horribles questions, qui ressembleraient à ceci :
◾Combien de temps l’Occident pourra-t-il acheter du pétrole et du gaz naturelà la Russie en échange d’or physique ?
◾Et, qu’arrivera-t-il au pétrodollar US, après que l’Occident aura épuisé tout son or physique pour payer le pétrole, le gaz naturel et l’uranium de la Russie, ainsi que pour payer pour des marchandises chinoises ?
Aujourd’hui, personne en Occident ne peut répondre à ces questions, qui semblent pourtant bien simples.
Et cela, Mesdames et Messieurs, çà s’appelle, « Échec et Mat ». Et, la partie est terminée.
Source :
http://www.mondialisation.ca/echec-et-mat-le-piege-en-or-de-vladimir-poutine-global-relay-network/5421592
Traduit par PLEINSFEUX.ORG